Smart contracts et antitrust

Interview avec le professeur Thibault Schrepel – professeur assistant à l’université d’Utrecht et affilié à l’université de Stanford

Le vendredi 6 novembre 2020, le pôle Digital Contracts d’ALI et l’association Assas concurrence ont eu le plaisir d’interviewer via zoom le professeur Thibault Schrepel, sur le thème choisi par l’invité : « Smart contracts et antitrust ».

Après avoir exposé son parcours, Thibault Schrepel a présenté brièvement sa thèse portant sur l’innovation prédatrice en droit de la concurrence[1]. Il a ensuite évoqué sa théorie de la granularité et donné son avis sur l’actualité concernant, d’une part, l’impact de la crise sanitaire sur les enquêtes habituelles des autorités de concurrence et d’autre part, la pertinence du « Digital Services Act » proposé par la Commission européenne.

M. Schrepel ensuite défini le concept de smart contract[2], puis s’est concentré sur le cœur de notre sujet : la relation entre les smart contracts et l’antitrust[3].

Les deux aspects de sa présentation peuvent se résumer ainsi :

1) La blockchain et le droit de la concurrence poursuivent un même objectif : décentraliser et redistribuer le pouvoir ;

2) Les smart contracts présentent un potentiel danger pour le droit de la concurrence, en raison de l’automatisation et la multiplication des relations contractuelles.

Pour réguler cette technologie, une solution serait, selon M. Schrepel, que les autorités régulatrices et les communautés de blockchain travaillent ensemble. Ces dernières coopéreraient pour satisfaire leurs objectifs respectifs : d’une part, protéger davantage le consommateur et d’autre part, continuer à développer les blockchains avec des contraintes légales adaptées.  

Thibault Schrepel a ensuite évoqué la question d’une possible responsabilité imputable au smart contract lui-même pour avoir réalisé une pratique anticoncurrentielle. Il a ensuite abordé le sujet de la distinction entre les « private » et « public blockchain », et souligné les avantages et inconvénients de l’une et l’autre pour des entreprises qui souhaiteraient s’entendre.

Il a enfin répondu à une question sur l’utilisation combinée de l’intelligence artificielle et de l’information de la blockchain par les autorités de concurrence pour nourrir leurs enquêtes et remplacer leurs présomptions par éléments plus probants, et déclaré que ce sujet ferait l’objet de son prochain projet au sein de l’université de Stanford.

Pour achever son interview, Thibault Schrepel a livré de précieux conseils aux jeunes étudiants qui souhaiteraient travailler sur un projet de recherche. Il encourage en particulier à lire l’ensemble de la littérature sur le sujet (quelques références citées dans l’entretien), puis à entrer en contact avec les communautés, notamment en effectuant des stages.  

M. Schrepel a enfin évoqué une vidéo de Patrick Henry Winston, professeur au MIT, intitulée « How to speak », qui explique comment passer un dernier message après une prise de parole, puis choisi comme ultime message de nous inviter à le contacter si l’on s’intéresse à son domaine de recherche et que l’on envisage d’effectuer un projet s’y rapportant.

Nous remercions vivement Monsieur le Professeur pour nous avoir fait partager sa vision très captivante sur un sujet peu exploré à ce jour.

Le Pôle Digital Contracts

Léa Bern, Farouk El Youssoufi, Juliette de la Guéronnière


[1] Sujet de la thèse : « L’innovation prédatrice sur les marchés des nouvelles technologies : analyses croisées en droit européen et nord-américain de la concurrence »

[2] Podcast : 19 minutes 57

[3] Podcast : 25 minutes 13

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